furomaju

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2017年2月21日火曜日

Note sur Children Solve Problems

Les idées en apparence les plus aberrantes ont toujours eu ma préférence. Des inventions et propositions d'Aphonse Allais au pianocktail de Boris Vian, en passant par voiture-maison  de l'excellent Microbe et Gasoil (Michel Gondry), j'aime le fantasque, le non-homologué... "L'imaginaire tend à devenir réel", écrit André Breton dans le Le Revolver à cheveux blancs, et je suis convaincu qu'il a raison. Pourtant, il constate aussi que bien souvent, au début de l'âge adulte, l'imagination disparaît, et ce définitivement. Là encore, la lecture récente du livre d'Edward De Bono Children Solve Problems, un charmant petit livre plein de dessins et d'idées, m'en a persuadé. À côté de l'imagination sans limite des enfants, que le monde des adultes paraît gris et étriqué (et ennuyeux) ! 


 

J'ai acheté ce livre complètement par hasard, séduit par le titre et les dessins. L'auteur m'était alors inconnu. Après une recherche, j'ai su que De Bono (rien à voir avec le groupe U2, ni avec le manga  Bonobono), spécialiste en sciences cognitives, avait théorisé la "pensée latérale" et mis au point la "méthode des six chapeaux" pour permettre à des idées nouvelles d'être exprimées. Sans connaître le type plus que ça, j'ai l'impression qu'il a écrit 80 fois le même livre et qu'il se la raconte un peu. Je vais en faire abstraction. Dans le livre qui nous intéresse (pas le plus connu de son auteur), De Bono a demandé à des enfants de dessiner une solution à des problèmes tels que :


faire cesser un chat et un chien de se battre
peser un éléphant
construire rapidement une maison
construire une machine amusante
faire le design et penser l'équipement d'une fusée spatiale
imaginer un vélo pour facteur
empêcher les mauvaises personnes de nuire
inventer une machine à sommeil
améliorer le corps humain

Les solutions proposées se révèlent souvent drôles et pleines de fantaisie. Elles montrent la pensée des enfants, à qui l'auteur rend hommage sans condescendance dans les notes et commentaires qui figurent sous chaque dessin. Un enfant prend manifestement du plaisir à penser, et se sert avec ingéniosité du matériau limité (savoir, expérience) dont il dispose. Voici quelques-uns des dessins qui m'ont plu :

    

    

    

  
    

   


Chaque problème sollicite un domaine particulier : la politique (le chien et le chat), le jugement moral, la technique, le traitement d'un problème éloigné des considérations personnelles, etc. À la fin de chaque chapitre, l'auteur propose une courte synthèse revenant sur les variétés des approches, leurs soubassements psychologiques, les jugements implicites, l'atmosphère générale...

Si les idées semblent souvent impossible à réaliser, dénuées de pragmatisme (encore que... et cette absence de pragmatisme peut donner naissance à d'autres idées elles parfaitement concrètes, c'est le principe même de la pensée latérale), l'aisance et le foisonnement de l'imagination peuvent rendre envieux bien des adultes, en particulier ceux pour qui être créatif, sortir des poncifs, est une nécessité. C'est mon cas, lorsque je pratique l'improvisation musicale avec mon groupe. Les deux écueils d'une jam session sont l'excès d'homogénéité (chacun recyclant des vieilles recettes, brodant sur ce qu'il sait faire) ou bien le chaos total. Difficile de trouver des solutions non-conventionnelles, de mettre son vieux surmoi entre parenthèses. L'intérêt d'un tel livre est qu'il inspire, et incite à faire preuve d'imagination, quitte à balancer des trucs un peu déments ou aberrants. Après avoir savouré le charme incongru des dessins et apprécié la pertinence des textes, on peut mettre le message du livre en pratique. 

Pour De Bono, "chaque dessin est un laboratoire dans lequel étudier". L'enfant peut être un penseur novateur et brillant. Dans Le peintre de la vie moderne, Baudelaire affirmait : "le génie n'est que l'enfance retrouvée à volonté". La citation est souvent écorchée, le "ne... que" n'y figure plus, pourtant, en l'employant, Baudelaire semble nous dire : c'est aussi simple que cela ! L'éducation, malheureusement, est souvent synonyme de détérioration. Elle met l'accent sur le respect des règles, souvent rigides. Penser vraiment devient dispensable, voire déconseillé ; c'est l'orthodoxie qui est valorisée. Gare aux idées atypiques qui oseraient s'aventurer dans une dissertation ! D'années en années, la masse de connaissances à assimiler s'accroît ; l'imagination décroît, de même que l'aptitude au jeu. À cela s'ajoute la crainte du jugement d'autrui, le pragmatisme, la peur de l'échec, les inhibitions et autres blocages... bien sûr, j'exagère mais tout de même, l'école c'est quand même la plupart du temps une catastrophe, le grand équarrissage pour tous... Sans parler du nombre croissant de crétins diplômés néo-cons, pro-Trump, soraliens tout pétés, têtes de mort fans de Dieudonné, de Chouard, de Zemmour, anars de droite rancis, dyonisiaques maffesoliens, badiousiens décomposés, épigones de Murray à tête de raie, tristes sires lâches et racistes, poutino-mélenchonistes : au secours. Les "humanités" ne produisent pas toujours les effets escomptés, et ce n'est rien de le dire... 

Bref, l'éducastration ne rend pas que des services. L'improvisation créatrice (la vie) prend un sacré coup dans les ratiches. Alors tant pis si l'auteur est un crypto-boloss voulant stopper le conflit israélo-palestinien à grand renfort de Marmite (!!) (lire https://www.theguardian.com/books/2000/jul/19/society), tant pis si son approche uniquement centrée sur la créativité s'avère limitée, j'ai aimé cette plongée dans les eaux vives de l'imagination enfantine. 

Références : Edward De Bono, Children solve problems, Penguin Books, 1972 (anglais).




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